Pour la première fois depuis le début de la pandémie COVID-19, le Conseil d’Etat a estimé que les libertés fondamentales étaient mises à mal par les mesures adoptées par l’Etat belge. Cet arrêt du 8 décembre 2020 concerne la question particulière de la liberté de culte.

Remarquons d’emblée que le Conseil d’Etat participe, à sa manière, à la lutte contre le coronavirus. Les parties requérantes ont demandé soit la suspension des mesures soit que les mesures soient remplacées par des mesures mieux proportionnées. Le Conseil d’Etat a ordonné que seule la seconde demande soit suivie face au constat d’inconstitutionnalité et a rejeté la demande en suspension de la mesure.

S’il a pris soin d’examiner le caractère sérieux du moyen et l’urgence qui conditionne l’introduction de cette requête, il octroie au pouvoir exécutif la possibilité d’adapter l’arrêté ministériel du 28 octobre 2020 endéans les 5 jours et de « réparer » ainsi l’atteinte portée à l’exercice de la liberté du culte.

Les articles 15, §§3, 4 et 17 de l’Arrêté ministériel du 28 octobre 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus COVID-19 devront ainsi être revus afin de garantir aux citoyens des mesures mieux proportionnées quant à l’exercice collectif du culte.

Alors que depuis plusieurs mois, des parties requérantes ont tenté, en vain, de faire reconnaître l’inconstitutionnalité des mesures liées à la lutte contre le COVID, il est intéressant d’examiner les arguments invoqués qui ont replacé la liberté de culte sur le devant de la scène.

Lors de l’examen du caractère sérieux du moyen, le Conseil d’Etat souligne que les cérémonies religieuses sont purement et simplement interdites alors que les rassemblements de personnes lors de cérémonie laïques restent permis dans une certaine mesure.

Cette distinction ainsi opérée ne repose prima facie sur aucun motif légitime.

L’examen de la proportionnalité de l’interdiction des célébrations religieuses tient également compte de la cohérence des mesures adoptées en parallèle dans la lutte contre le COVID-19. Le Conseil d’Etat ne comprend en effet pas pourquoi le nombre de personnes autorisées à se réunir en extérieur diffère selon que les personnes se réunissent pour un mariage, pour un enterrement ou sans but précis. En outre, il souligne également la disproportion qui existe lorsque l’interdiction des célébrations religieuses est maintenue alors que des mesures d’assouplissements de nature générale sont prises par l’arrêté ministériel du 28 novembre 2020.

Au terme de cet examen, le Conseil d’Etat reconnait que l’encadrement strict des cérémonies religieuses par rapport aux réunions laïques, sans exceptions (mêmes conditionnées), rend de facto l’exercice du culte impossible. Il est dès lors disproportionné.

L’examen de l’urgence consacre quant à lui l’importance des célébrations religieuses intervenant durant le mois de décembre.

La pandémie du COVID 19 n’a pas fini de nous interpeller quant aux limites qui sont imposées aux libertés fondamentales. Cet arrêt du 8 décembre 2020 marque donc un tournant dans la jurisprudence relative aux mesures adoptées par l’Etat, En préférant la modification des mesures à une simple suspension, le Conseil d’État aiguille l’État quant à la légalité et la cohérence de ses mesures COVID-19.

Le score en faveur des libertés fondamentales a changé : requérant 1 – Covid 0. Rendez-vous dans 5 jours pour connaître les suites réservées par l’Etat Belge.