Depuis quelques mois, un objet nous accompagne tous dans nos déplacements, nos discussions et nos photos. À tel point qu’on pourrait croire que les enfants nés en 2020 et 2021 n’imaginent pas qu’un visage contienne une bouche et un nez.
Ces objets de tous les jours sont tantôt chirurgicaux, tantôt FFP2 ou FFP3. Il y a aussi les masques « en tissus », les bandanas, les écharpes.
Au gré des disponibilités, les modèles se sont multipliés, les appels au retour aux masques normés ont été plus nombreux. L’actualité nous rappelle l’importance de bien comprendre ce qui est commandé, pourquoi et par qui ? Et cette question est d’autant plus prégnante lorsque c’est l’Etat qui achète des masques.
L’achat de produits par les pouvoirs publics soulève la question de la coexistence de réglementations distinctes et, en l’occurrence, complémentaires : la réglementation relative aux marchés publics et la réglementation relative aux produits, notamment aux produits de santé(1). Cela pose dès lors nécessairement la question de la possibilité de déroger aux normes et la nécessaire application des normes comme standard devant être respecté par les fournisseurs pour pouvoir valablement commercialiser leurs produits.
Et pourtant…
La pandémie aurait-elle mis à mal non seulement certaines habitudes, mais aussi certains droits ? La nécessité fait-elle la loi ? Au plus fort de la pandémie, alors que les masques manquaient, des protocoles alternatifs ont été mis en place pour permettre l’utilisation de masques non conformes. Le site internet du SPF économie explique, par le menu, le sort réservé au matériel individuel de protection non conforme.
La tentation est grande de lire dans ces mesures une possibilité de considérer conforme du matériel qui ne le serait pas. C’est là pourtant, un raccourci bien dangereux. C’est bien parce qu’ils sont non-conformes et en cette qualité, que des protocoles particuliers ont été mis en place. Ce faisant, les autorités n’ont pas permis de qualifier conforme ce qui ne l’est pas, mais uniquement de commercialiser ces produits non-conformes pour autant qu’ils répondent à ces nouvelles normes.
Il appartient alors à l’acheteur, même public, de choisir d’accepter ou non ce produits de qualité inférieure. Mais même alors, ce matériel doit être conforme à cette norme inférieure.
La nécessité, si elle a fait la loi, n’a pas défait celle qui existait : si un produit répondant à une norme a été commandé, il devait y être conforme. S’il ne l’est pas, il appartient au fournisseur de remplir son obligation ou d’indemniser le client – même public – du préjudice subi.
(1) Seuls les masques chirurgicaux sont des produits de santé.